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  • Writer's pictureNicoletta Fagiolo

CHARLES ONANA: NÉGATIONNISTE DU GÉNOCIDE OU NOUVEL HISTORIEN ?


Charles Onana expliquant la crise congolaise.

 

 

Jason Stearns, l'empire à l'abri des regards


Jason Stearns, professeur assistant en études internationales à l'université Simon Fraser et directeur du Congo Research Group, auteur de deux livres sur le Congo, Dancing in the Glory of Monsters et The war that does not say its name, a récemment écrit un article pour la revue Afrique XXI, Rwanda-RD Congo, La guerre des Récits, dont l'objectif principal semble être de calomnier l'un des principaux historiens africains, Charles Onana, dans la perspective d'un procès politique intenté à Onana pour négationnisme de génocide qui se tiendra cet automne à Paris.


On ne peut que se demander pourquoi Stearns consacre un article entier à l'érudit Onana, qu'il a qualifié en une phrase de théoricien du complot dans son précédent ouvrage.[i]  Le livre de Justin Podur, professeur associé au département des changements environnementaux et urbains de l'université York de Toronto et analyste géopolitique, America's Wars on Democracy in Rwanda and the Democratic Republic of Congo, (Les guerres de l'Amérique contre la démocratie au Rwanda et en République démocratique du Congo) publié en 2021, révèle, par une analyse méticuleuse, l'objectif des écrits souvent trompeurs de Stearns. En adoptant un point de vue anti-impérialiste, Podur voit clair à travers la propagande que des africanistes comme Gérard Prunier, Michela Wrong et Jason Stearns, entre autres, répandent sans relâche sur les génocides passés et actuels qui se déroulent dans les Pays des Grands Lacs.  


Podur explique : « J'utilise le terme « africaniste » de la même manière qu'Edward Said a utilisé le terme « orientaliste », comme quelqu'un qui déploie des idées sur les Africains d'une manière qui met  l'empire à l’abri des regards. L'africaniste, comme l'orientaliste, interprète le continent et ses habitants pour l'Occidental, en expliquant les complexités et les subtilités de l'esprit africain, étrange et différent. »


 Dans un article récent, « Limited Hangouts :  Western Intellectuals Whitewash Horrific Crimes of CIA Asset Paul Kagame », Podur analyse brillamment le dernier livre de Michela Wrong et révèle comment les africanistes opèrent pour obscurcir les crimes majeurs : « Le fait que le livre ait concentré  le débat sur certains points précis - en omettant les pires crimes du FPR (Front patriotique rwandais), cette structure de propagande qui facilite le néocolonialisme dans la région et assure l'innocence de l'Occident  – est un cours de maître de l'écriture africaniste. Michela Wrong a montré comment il fallait faire ». Jason Stearns suit ses pas.


Cet article sur Charles Onana est également signé par Archie Macintosh, qui est, selon l'article, un chercheur indépendant. Une recherche rapide sur l'internet révèle qu'il n'y a pas d'auteur portant ce nom et que cet article est le seul qu’il a jamais écrit. 


Stearns commence son article en expliquant que le manque de couverture médiatique de la guerre congolaise dans l'est du pays est dû selon lui à sa complexité : « elle est présentée comme trop complexe, avec des douzaines de groupes armés qui se battent pour une myriade de raisons, souvent très locales ». Le terme « local » est sans cesse répété dans les écrits de Stearns afin d'obscurcir davantage ce qui est en réalité une guerre internationale par procuration dans la région des Grands Lacs depuis 1990.  Si l'on considère un autre génocide contemporain, celui des Palestiniens de Gaza, les conflits entre les factions palestiniennes locales pourraient-ils être tenus pour responsables de l'occupation et du génocide en cours à Gaza ? Pourtant, cette affirmation absurde est répétée à plusieurs reprises par Stearns dans ses écrits à propos de la guerre dans l'est du Congo.


Stearns poursuit en citant une autre raison fallacieuse pour expliquer l'absence de couverture de la guerre en RDC : « trop périphérique par rapport aux intérêts des superpuissances ». Ah bon ? Le pays le plus riche du monde, sans les minéraux duquel aucune révolution verte ne serait possible, n'intéresse pas les superpuissances ?  Quel  manque de sincérité ! [ii]

 

Réduire le débat au silence et ignorer les archives historiques


Stearns écrit qu'il n'y a pas d'images de cette guerre en cours (ce qui est également inexact) et affirme ensuite, en citant le livre de Susan Sontag, Devant la douleur des autres, que les images de guerre peuvent conduire à un appel à la vengeance .L'ouvrage de Susan Sontag aborde de nombreux aspects de la photographie de guerre et examine sa valeur éthique : « Pourquoi devrions-nous regarder ces photographies d'horreurs lointaines si nous ne sommes pas en mesure de faire quoi que ce soit à propos de ce qu'elles montrent ? De telles images [...] [sont] une invitation à prêter attention, à réfléchir, à apprendre, à examiner les justifications des souffrances massives offertes par les puissances établies. Qui est à l'origine de ce que l'image montre ? Qui est responsable ? »


Si l'on met de côté la lecture réductrice que fait Stearns du livre perspicace de Sontag, en suivant sa ligne de pensée, il aurait donc été préférable pour le monde de ne pas avoir les images quotidiennes d'un autre drame contemporain en cours, l'actuel massacre des Palestiniens, car ces images pourraient susciter des sentiments de vengeance, voire de violence ? Les images quotidiennes diffusées en direct de Gaza constituent une documentation sur les violations des droits de l'homme et sont nécessaires pour enregistrer ce qui s'est passé, la mémoire historique collective d'une nation qui, selon Sontag, agit comme une réminiscence éthique. En outre, la vision de ces images a incité des millions de personnes dans le monde à protester pacifiquement contre le massacre quotidien à Gaza. Ces images n'ont pas suscité la violence, mais ont plutôt permis à la plupart des gens de comprendre l'ampleur des massacres et des violations inhumaines des droits de l'homme commises par Israël en Palestine occupée, et ont poussé les gens à adopter des actes de désobéissance civile - de nombreux étudiants des universités américaines ont déchiré leur diplôme de fin d'année pour protester contre le soutien des États-Unis à Israël, d'énormes manifestations ont été organisées dans le monde entier, des campagnes BDS ont été lancées, des marches, des débats et des podcasts ont été organisés, des livres d'histoire et des poèmes ont été écrits - appelant à des sanctions contre Israël, à l'arrêt des livraisons d'armes des États-Unis à Israël et à la fin de ce génocide.  Ces images ont également poussé l'Afrique du Sud à déposer, en décembre 2023, une plainte contre Israël devant la Cour internationale de justice, l'accusant d'avoir commis un génocide à l'encontre des Palestiniens.


Stearns, après avoir déclaré qu'il n'y avait pas d'images de la guerre au Congo - bien que de nombreuses images soient disponibles aujourd'hui et qu'il aurait pu contribuer, vu qu’il a travaillé longtemps sur le terrain, à documenter rigoureusement les massacres hebdomadaires - passe de la photographie de guerre à des récits contradictoires de type conspirationniste qui « façonnent la prise de décision », mais aussi « la violence sur le terrain ». Qui prend les décisions ? Quelle violence ? Quels récits contradictoires ? Et surtout, quelle est la relation entre la photographie et les récits contradictoires ?


La photographie peut être manipulée, mais elle constitue le plus souvent une preuve tangible difficile à écarter, tout comme les archives historiques sont des sources primaires utiles pour reconstituer des événements historiques. L'historien Charles Onana travaille presque exclusivement sur des archives historiques et des témoignages de première main, alors que Stearns ignore les archives historiques et n'utilise quasi exclusivement que des sources secondaires occidentales, des sources qui peuvent être facilement manipulées, contrairement aux archives, qui, sans filtre, sont des preuves documentaires claires et nettes.


Stearns évoque des émotions (références à la douleur, à la catastrophe, à la vengeance et à la violence) afin d'éviter les faits historiques et les preuves archivistiques, et affirme ici indirectement que les récits expliquant la guerre devraient être réduits au silence, car ils peuvent susciter la vengeance ou même la violence. En cela, il est en phase avec le président rwandais Paul Kagame, marionnette soutenue par l’Occident,  et ses escadrons de la mort qui parcourent le monde en réduisant au silence, également par l'assassinat, toute critique au régime totalitaire rwandais.


Lors d'une récente conférence de presse à Kigali, Kagame est allé jusqu'à menacer l'écrivain Charles Onana ainsi que la candidate à la présidence Victoire Ingabire Umuhoza. Voici un extrait du communiqué de presse du 25 juillet 2024 rédigé par les avocats de Mme Ingabire, qui affirment que les commentaires de M. Kagame sont « diffamatoires, imprudemment, incendiaires et dangereux » : « Le 13 juillet 2024, le Président a donné une conférence de presse. À la fin de cette conférence de presse, il a fait référence à des activités dans lesquelles, selon lui, Mme Ingabire était impliquée, notamment « passer [son] temps à crier », « lutter contre le mal qui est en elle », « travailler avec des personnes impliquées dans la guerre à l'est du Congo », et « souhaiter ou dire du mal du Rwanda » avant de déclarer : « Vous savez qu'elle ne finira pas bien ». Le président a ajouté : « On ne peut pas leur permettre [à des personnes comme Madame Ingabire et Charles Onana] d'atteindre un niveau où leur action peut avoir des conséquences négatives sur le pays ou sur les Rwandais. Lorsqu'ils atteignent ce niveau, nous trouvons une solution appropriée... Lorsqu'ils racontent des mensonges, nous réfutons ce qu'ils disent. Mais s'ils dépassent les bornes, les conséquences sont claires ». Kagame a fait ces déclarations mafieuses et inacceptables en kinyarwanda, ce qui explique qu'elles n'aient pas été reprises par les principaux médias. Les avocats de Mme Ingabire déclarent que le gouvernement rwandais sera tenu pour responsable si Mme Ingabire subit un quelconque préjudice.


L’utilisation de la fausse équivalence


Dans le premier sous-titre de l'article en question, « Nous sommes prêts à nous battre », Stearns écrit que le Congo ne devrait pas blâmer le Rwanda pour toutes les violences dans l'est du Congo, qualifiant cette accusation de « raccourci populaire ». Le rejet d'une guerre d'agression longue de presque trois décennies, qui a débuté en 1996 et qui aurait dû appeler au minimum des sanctions internationales à l'encontre des agresseurs, est ahurissant, d'autant plus que l'Ouganda a été condamné par la Cour Internationale de Justice en 2005 pour le crime d'agression contre le Congo.


En mai 2024, Tracy Walsh a écrit un article intitulé Rwanda's role in eastern DRC conflict : why international law is failing to end the fighting (Le rôle du Rwanda dans le conflit à l'est de la RDC : pourquoi le droit international ne parvient pas à mettre fin aux combats) dans The Conversation : « Il y a vingt ans[iii], la RDC a déposé une plainte contre le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda devant la CIJ. Cette plainte concernait le type de violence auquel nous assistons aujourd'hui. Les plaintes contre l'Ouganda sont allées de l'avant, parce que l'Ouganda a consenti à la juridiction de la CIJ. En 2005, la CIJ a statué en faveur de la RDC, estimant que l'Ouganda était responsable de la violence dans le pays. En 2022, la Cour a ordonné à l'Ouganda de payer 65 millions de dollars de réparations liées à l'arrêt de 2005. La plainte contre le Rwanda a été rejetée car la Cour a estimé qu'elle n'était pas compétente. Le Rwanda n'a pas consenti à la compétence de la CIJ. La CIJ a donc dû examiner si d'autres traités auxquels le Rwanda et la RDC sont parties pouvaient donner à la Cour compétence sur les demandes de la RDC. Elle a conclu que ce n'était pas le cas ».


Si le Rwanda et l'Ouganda ne sont pas à blâmer pour cette agression en cours dans l'est du Congo, on peut se demander quel était donc le sujet du processus de paix qui dure depuis trois décennies ? Le dernier processus de paix à Luanda a établi un cessez-le-feu depuis le 4 août dernier, mais le Rwanda et sa dernière milice proxy dans la région, le M23, ne le respectent pas, car leurs forces continuent à faire la guerre et ont récemment réoccupé, à la fin du mois d'août 2024, Masisi (en prenant les villages de Kaniro, Lukopfi ainsi que le pont de Kisuma situé à moins de 20 kilomètres du centre de Masisi) et Rutshuru dans le Nord-Kivu. Les conséquences sur la population locale sont dévastatrices.


L'appel au cessez-le-feu, sans sanctions internationales préalables contre le Rwanda et l'Ouganda pour le faire respecter, est tout aussi insuffisant sur le plan diplomatique que le sont les vagues appels répétés au cessez-le-feu à Gaza sans sanctions internationales préalables, sans lignes rouges fixées ou sans embargo sur les armes imposé à Israël pour ses 76 années d'agression.


La dénonciation de l'agression rwandaise par le président congolais Felix Tshisekedi, qui compare Kagame à Hitler, est qualifiée « d’hyperbole » par Stearns. Pour une guerre d'agression qui a déplacé aujourd'hui 7, 2 millions de Congolais (déplacements qui durent depuis vingt-huit ans) et qui a fait au moins 12 millions de morts et des massacres hebdomadaires, on ne peut s'empêcher de se demander ce qu'il y a de si exagéré dans cette affirmation : Kagame et ses alliés occidentaux ont tué plus de personnes dans la région que le roi belge Léopold II, dont les crimes décrits dans le livre d'Adam Hochschild, Les Fantômes du roi Léopold, Un holocauste oublié, sont aujourd'hui abhorrés.


Stearns utilise ensuite une fausse équivalence en plaçant les revendications du Rwanda sur le même pied que celles des Congolais, brouillant ainsi les barrières entre l'agresseur et l'agressé. C'est également le cas à plusieurs reprises dans la guerre de Gaza, où l'analyse commence le 7 octobre 2023, effaçant des décennies de siège et d'occupation israéliens subis par les Palestiniens.


Fabriquer des arguments  pro- Kagame


Stearns écrit, 30 ans trop tard, que le groupe rebelle FDLR (anciens réfugiés hutu) au Congo ne constitue plus une menace pour le Rwanda et ne devrait pas être utilisé comme prétexte par le président rwandais Kagame pour envahir l’est du Congo. Cependant, des rapports confidentiels de l'UE et des États-Unis, révélés dans les livres d'Onana, montrent que les réfugiés hutus n'ont jamais été une menace pour le Rwanda, que cette menace était inexistante dès 1994, un facteur également corroboré par les câbles de Wikileaks. Pourtant, Stearns a choisi d'ignorer ces preuves d'archives. pendant des décennies, justifiant ainsi la guerre d'agression du Rwanda au Congo.

 

Cependant, Stearns renforce le deuxième faux prétexte prédominant utilisé par Kagame depuis 1996 pour envahir l'est du Congo (alors Zaïre), à savoir venir à la protection des Tutsis vivant au Congo, connus sous le nom de Banyamulenge.


Lors d'un récent échange sur twitter/X avec Michela Wrong, j'ai écrit qu'elle devrait aborder le fait erroné qu'elle a écrit dans son livre In the footsteps of Mr. Kurtz, à savoir que Lwabanji Lwasi, alors vice-gouverneur du Sud-Kivu, avait déclaré au début de l'invasion du Zaïre par le Rwanda le 24 octobre 1996 que « tous les Tutsis devaient quitter le pays car ils étaient persona non grata ». Alors que je cherchais la citation erronée dans son livre pour la poster sur twitter-X et ouvrir un débat, je me suis retrouvée bloquée par elle après que Wrong m'a traitée de « lectrice négligente ». Elle a toutefois écrit ce que j'ai contesté (capture d'écran ci-dessous).






Échange sur Twitter avec Michela Wrong et extrait de son livre de 2012 In the Footsteps of Mr Kurtz : Living on the Brink of Disaster in the Congo.

 

Le vice-gouverneur Lwabanji Lwasi s'est exilé en Europe et a finalement gagné un procès en Belgique où il a été prouvé qu'il n'avait jamais tenu de tels propos xénophobes, mais avait au contraire suggéré que tous les groupes ethniques (y compris les Tutsis vivant au Congo) devraient être éloignés de la frontière, en créant un corridor humanitaire en vue de l'imminente invasion rwandaise, camouflée sous la forme d'un mouvement de libération. J'ai filmé le témoignage détaillé de Lwasi sur ces événements.


Stearns sur cet épisode répète le même mensonge : « La plus grande panique, cependant, a été provoquée par la déclaration publique du vice-gouverneur du Sud-Kivu, dans la première semaine d'octobre 1996, que les Banyamulenge avaient six jours pour quitter les Hauts Plateaux sous peine d'être considérés comme des rebelles. » [iv] (c'est moi qui souligne)


Ce prétexte d'un sentiment anti-Tutsi de la part des Congolais est la lentille déformée à travers laquelle les pro-Kagame et les apologistes de l'empire américain veulent que les lecteurs lisent la crise, afin de justifier les incursions en cours dans l'est du Congo et dissimuler leurs actions catastrophiques dans la région. 


Les propagandistes du massacre de Gaza utilisent également une stratégie géopolitique du brouillard : la critique du génocide israélien est assimilée à de l'antisémitisme, plutôt qu'à de l'antisionisme, sans tenir compte du fait que certaines critiques les plus rigoureuses des politiques israéliennes proviennent de journalistes et d'universitaires juifs (Max Blumenthal, Norman Finkelstein, Ilan Pappé, pour n'en citer que quelques-uns parmi tant d'autres).

 

Appeler les faits des perceptions et les perceptions des faits

 

La sous-section suivante de l'article s'intitule « Une guerre de perceptions » : Stearns y réduit une guerre d'agression et d'occupation à de simples perceptions. Il donne trois exemples: l'appel du cardinal Fridolin Ambongo au Rwanda pour qu'il mette fin à ses visées expansionnistes et à son pillage systématique des ressources naturelles congolaises (or le pillage au Congo est documenté par les rapports du groupe d'experts des Nations unies sur l'exploitation illégale des ressources naturelles depuis avril 2001, où le terme « illégal » est crucial) ; la décision du chanteur Fally Ipupa de boycotter le Rwanda et de ne plus y organiser de concerts ; l'appel du prix Nobel de la paix et gynécologue Denis Mukwege à sanctionner le Rwanda. Comment ou pourquoi ces exemples peuvent-ils être considérés comme des perceptions ?


Stearns poursuit en évoquant les perceptions rwandaises : « Il est clair que le parti au pouvoir au Rwanda se sent injustement accusé. » Clair pour qui ? Les Rwandais sont donc réduits par Stearns au parti au pouvoir ? Il admet qu'il n'y a pas de place pour la dissidence au Rwanda aujourd'hui, mais il poursuit en déclarant que « de nombreux Rwandais, notamment les plus âgés, craignent que les divisions ethniques du passé soient ravivées et que l’étincelle vienne de l’est de la RDC. »  Stearns ne souligne pas le fait que l'ensemble de la population rwandaise se sent opprimée par le régime de Kagame et que cela n'est pas dû à une quelconque forme de tension ethnique de l'autre côté de la frontière, mais bien au parti oppressif qu'est le FPR. La manière de dépasser un tel régime répressif ne fait pas partie du plaidoyer de Stearns : une fois de plus, il blâme le Congo pour détourner les lecteurs du vrai problème, le régime rwandais et son comportement à l'intérieure comme à l'extérieur du pays.


Le rôle secret des USA dans la tragédie rwandaise


La section suivante est intitulée « Les thèses conspirationnistes de Charles Onana ». Stearns écrit qu'Onana « a publié vingt-six livres, au rythme de plus d'un par an pendant deux décennies » et, sans donner de détails, il souligne que son travail est d'une « qualité disparate et leur rigueur douteuse ». Pour ne prendre qu'un exemple, l'historien Eric Hobsbawm a lui aussi écrit de nombreux livres, souvent plus d'un par an, mais on le considère comme étant un écrivain prolifique.  Les témoins de poids qui ont préfacé les livres d'Onana, tels que l'ancien président sud-africain Thabo Mbeki, l'ancien ministre français de la défense sous Jacques Chirac, Charles Millon, ou le militant et artiste Adolfo Pérez Esquivel, lauréat du prix Nobel de la paix 1980, sont écartés. Comme un Orientaliste, il ignore  le contenu de ces préfaces.


Les lecteurs qui ne connaissent pas le travail de Charles Onana seraient peut-être intéressés de savoir que ses livres couvrent un large éventail de thèmes historiques et géopolitiques africains : son premier livre est consacré au deuxième président de la République centrafricaine, Jean-Bédel Bokassa, écrit il y a près de trois décennies, en 1998 ; deux livres portent sur le rôle des Tirailleurs sénégalais, un corps d'infanterie africaine dans l'armée française sous le colonialisme ; une enquête sur le Soudan du président Omar Hassan Ahmad al-Bashir; la crise ivoirienne de 2002 à 2010, qui a finalement abouti à un changement de régime franco-onusien contre un président légitime, Laurent Gbagbo; une enquête sur une opération psychologiques française en 2004 en Côte d'Ivoire, connue sous le nom de Bouaké ; le rôle de la chanteuse et actrice Joséphine Baker dans la lutte contre Hitler ; les réponses régionales de l'Afrique à Boko Haram, parmi d'autres. Vivant en France, il a également abordé des thèmes liés aux politiques françaises dans Palestine le malaise français, révélations des archives de l'Élysée.


Les Éditions Duboiris, la maison d'édition d'Onana, n’est pas aussi petite que l'écrit Stearns, elle a publié une grande variété d'auteurs et abordé une réelle diversité de sujets: les souvenirs du chef de la Mission des Nations unies pour l'assistance au Rwanda Jacques-Roger Booh Booh, mais aussi ceux de la célèbre militante américaine des droits civiques Amelia Boynton Robinson ou de Theodor Michael Wonja, acteur noir, survivant des camps nazis allemands; l'antiracisme d'Einstein; l'assassinat de l'un des principaux combattants pour l’indépendance Africain, le Camerounais Félix-Roland Moumié, raconté par son épouse ; un entretien en tête-à-tête avec l'ancien président des Comores, le colonel Azali Assoumani, etc.


Huit livres d'Onana portent sur la région des Grands Lacs, où l'accent est principalement mis sur l'histoire du Rwanda et l'invasion de l'est du Congo par le Rwanda, chaque publication contenant de nouvelles preuves obtenues grâce à des documents d'archives récemment déclassifiés. Onana a enquêté sur l'assassinat de deux présidents africains, le président rwandais Juvénal Habyarimana et le président burundais Cyprien Ntaryamira, le 6 avril 1994, événement connu pour avoir déclenché la tragédie rwandaise ; sur les lacunes des procès du tribunal d'Arusha ; sur la guerre d'agression du FPR et son rôle dans la guerre d'agression au Rwanda (1990-94) puis au Zaïre (1996) et l'occupation subséquente de l'est du Congo ; le rôle de la France et son opération Turquoise ; le rôle de l'Europe et de l'Amérique dans la crise rwandaise et congolaise. Jason Stearns, qui n'a rien publié sur le Rwanda, agit comme s'il était lui-même une référence incontournable sur les sujets analysés par Onana, ce qui est particulièrement incongru.


Stearns accuse ensuite Onana de simplifier un sujet complexe en soulignant le rôle central des Etats-Unis et de certaines multinationales spécialisées dans les minerais stratégiques et rares dans le changement de régime au Rwanda (1990-94) ainsi que dans l'invasion du Zaïre en 1996. Helen Epstein, dans un article publié dans The Guardian en 2017 America’s secret role in the Rwandan genocide (Le rôle secret des États Unies dans le génocide Rwandais), écrit : « Les responsables américains savaient que Museveni n'honorait pas sa promesse de faire passer les dirigeants du FPR en cour martiale. Les États-Unis surveillaient les livraisons d'armes ougandaises au FPR en 1992, mais au lieu de punir Museveni, les donateurs occidentaux, y compris les États-Unis, ont doublé l'aide à son gouvernement et ont permis à ses dépenses militaires d'atteindre 48 % du budget de l'Ouganda, contre 13 % pour l'éducation et 5 % pour la santé, alors même que le sida ravageait le pays. En 1991, l'Ouganda a acheté 10 fois plus d'armes américaines qu'au cours des 40 années précédentes réunies. » Une accumulation d'armes aussi incroyable devrait justifier des recherches plus approfondies. Barrie Collins a analysé le soutien diplomatique américain dans un ouvrage novateur publié en 2014, Rwanda 1994 : The Myth of the Akazu Genocide Conspiracy and its Consequences (Rethinking Political Violence), qui fait voler en éclats le récit réductionniste et pourtant standard de la tragédie rwandaise.


Le rôle primordial des multinationales dans le soutien des guerres du Congo a été largement documenté par des chercheurs comme Alain Denault dans Noir Canada ou Patrick Mbeko dans Le Canada dans les guerres en Afrique centrale : génocide & pillages des ressources minières du Congo par le Rwanda interposé, parmi d'innombrables autres sources. Les sociétés minières canadiennes Barrick Gold et Barno ont attaqué l'auteur Alain Denault pour avoir écrit sur ce sujet. L'histoire dramatique de la procédure judiciaire est racontée dans le documentaire Silence is Gold.

 

Pour être précis, Stearns cite à nouveau de manière erronée le travail d'Onana en écrivant : « Selon lui, la crise congolaise a été orchestrée depuis le début par le gouvernement rwandais, lui-même au service des Etats-Unis, des membres de l'élite française et des multinationales. » Onana reconstitue en détail la rivalité anglo-française à la fin du siècle dernier - un fait étayé par l'ancien ministre français de la défense Charles Millon, dans la préface du dernier livre d'Onana, Holocauste au Congo, l'omerta de la Communauté internationale, désormais également disponible en anglais. Le soutien de la France au régime de Kagame n'intervient que bien plus tard, sous la présidence de Nicolas Sarkozy et celle d'Emmanuel Macron.

 

Le génocide qui ne dit pas son nom[v]


Stearns minimise ensuite le nombre de personnes qui sont mortes au Congo depuis 1996 en demandant aux lecteurs de faire la distinction entre les personnes directement tuées par les invasions rwandaises et celles qui sont mortes à cause des conséquences de la guerre !The International Rescue Committee, qui a mené des enquêtes dans la région, a écrit en 2008 : « Le conflit et la crise humanitaire en République démocratique du Congo ont coûté la vie à environ 5,4 millions de personnes depuis 1998 et continuent de faire jusqu'à 45 000 morts par mois. (...) Le conflit et ses conséquences, en termes de décès, dépassent tout ce qui s'est passé depuis la Seconde Guerre mondiale », déclare le président de l'organisation humanitaire, George Rupp. Les pertes du Congo sont équivalentes à la population entière du Danemark ou de l'État du Colorado qui aurait péri en l'espace d'une décennie ». Ces chiffres sidérants excluent les civils qui sont morts pendant la première guerre brutale de 1996-1998 et les 17 années de guerre qui ont suivi dans la région, jusqu'à aujourd'hui. En outre, Stearns ne donne pas d'autres statistiques possibles, ni d'autres sources.

 

Stearns remet même en question le chiffre élevé de 500 000 viols, données qui proviennent du lauréat du prix Nobel de la paix et chirurgien gynécologue, le docteur Denis Mukwege, qui travaille avec les victimes de viol depuis maintenant plus de vingt ans dans la région ! Stearns écrit ensuite que les statistiques sur les viols sont rares ! Pourtant, une simple recherche sur Wikipédia révèle des estimations encore plus élevées : « Pour la seule année 2011, on estime qu'il y a eu jusqu'à 400 000 viols. Un article paru dans l'American Journal of Public Health donne une estimation de deux millions de victimes de viols en 2011. » Stearns ne devrait-il pas se pencher sur ces atrocités de masse où le viol est utilisé comme arme de guerre et de génocide, plutôt que de débattre du nombre exact de viols ? Stearns a-t-il pris la peine d'interroger Denis Mukwege ou d'autres médecins travaillant dans la région ? Un chapitre du récent livre d'Onana, Holocauste, est consacré aux victimes de viol, et leurs témoignages sont extrêmement difficiles à lire en raison de l'extrême souffrance à laquelle ces femmes sont confrontées. Ce chapitre devrait être lu par tout le monde. Où sont les mouvements internationaux de défense des droits de la femme ? Pourquoi ces victimes sont-elles laissées à elles-mêmes ? Qui, dans son esprit, minimiserait de telles atrocités ?

 

En outre, la citation des statistiques ci-dessus que Stearns attribue à tort à Onana est en fait tirée de la préface d’Holocauste au Congo, l'omerta de la communauté internationale, écrite par l'ancien ministre français de la défense, Charles Millon. 


Holocauste au Congo  plonge le lecteur dans les années qui ont précédé et suivi la chute du président congolais Mobutu Sese Seko avec l'invasion du Zaïre (aujourd'hui Congo) en 1996 par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) et la mise en place d'un système d'occupation désormais bien implanté. Les principaux événements sont reconstitués à l'aide de sources d'archives primaires - archives présidentielles américaines et françaises, rapports et mémos des agences de sécurité nationales américaines, lettres, audiences du Congrès, procès judiciaires, enquêtes parlementaires et articles de journaux de l'époque - ainsi que d'entretiens avec des acteurs clés. Les sources secondaires sont également largement citées, avec une attention particulière pour une variété d'auteurs congolais émergents moins connus.


Ignorant les nouvelles preuves irréfutables révélées par Holocauste, Stearns conclut cette partie par de nouvelles calomnies : « Peu de chercheurs sérieux considèrent ce dernier livre comme un travail scientifique solide. » Quels chercheurs ? C'est justement l'absence de travaux de recherche érudites sur la région qui a incité Onana à se plonger dans les sources d'archives.


Voici un extrait de Justin Podur sur l'insuffisance des écrits de Stearns :

« Le spécialiste américain du Congo Jason Stearns, qui a travaillé sur le Congo pour l'ONU et l'International Crisis Group, déclare dans son livre de 2011 au titre exotique, Dancing in the Glory of Monsters, qu'il veut « comprendre pourquoi la guerre avait plus de sens que la paix, pourquoi les élites politiques régionales semblent être si riches en opportunisme et si dépourvues de vertu. » Il laisse entendre qu'il recherche une analyse systémique. Mais de quel système parle Stearns ? Son objet d'étude étant les élites politiques régionales, il ne s'agit pas d'un système international. Stearns cite « un ami et parlementaire congolais » qui dit que pour survivre, nous devons tous être un peu corrompus, un peu impitoyables. C'est le système ici". En ce qui concerne les affaires, Stearns évoque le « sous-texte » d'un entretien avec un homme d'affaires, à savoir que « c'est le Congo - si nous ne nous salissons pas les mains de temps en temps, nous ne ferons plus d'affaires ». Il poursuit en disant que « pour beaucoup, la moralité pure et dure n'a pas sa place ici ».


Il dresse une liste de personnalités qui ont échoué à cause de leur idéalisme : Etienne Tshisekedi, Wamba dia Wamba, Che Guevara - « le Congo a toujours défié les idéalistes ». Le cas Wamba dia Wamba est reputé etre une illustration de « l'état tragique du leadership politique congolais : même lorsqu'un homme aux références politiques et éthiques irréprochables tente d'apporter des changements, les résultats sont médiocres ». « Stearns conclut l'histoire de Wamba par une série de déclarations racistes de travailleurs expatriés non attribués. « Les Congolais aiment s'amuser et danser », “on peut acheter n'importe qui ici”, “ils sont comme des enfants.” Stearns ne conteste pas ces caricatures, bien qu'il les qualifie « d’attitude condescendante » chez les « Indiens, Européens, Arabes ou Américains ». Il reproche simplement à ces expatriés de refuser de « réfléchir à la raison pour laquelle ces prétendus traits de caractère se sont développés ». Ayant admis que le Congo exerce une certaine influence corruptrice, Stearns crée un homme de paille à abattre en affirmant que cette influence corruptrice n'est pas due à « un défaut génétique dans l'ADN congolais... ou même à quelque chose dans la culture congolaise ». Mais que propose-t-il à la place ? Le dysfonctionnement est apparemment « profondément enraciné dans l'histoire politique du pays » - dans l'esclavage, le colonialisme et la dictature de Mobutu qui laisse faire des dirigeants idéalistes marqués par « un manque de base populaire et la faiblesse abjecte de l'État ». En conséquence, « l'idéologie ou l'éthique la plus féroce que l'on puisse trouver dans le pays est ethnique ».


Parfois, écrit Stearns, « il semble qu'en franchissant la frontière du Congo, on abandonne toute perspective archimédienne sur la vérité et on se retrouve pris dans un réseau de rumeurs et d'allégations, comme si le pays lui-même était l'objet d'une fiction post-moderne ». Stearns pense que cela peut être dû à un « déficit structurel », avec l'absence de presse libre, de système judiciaire indépendant ou de « parlement inquisiteur. » « Mais c'est aussi devenu une question de fierté culturelle. Les gens tissent des rumeurs et des mythes autour d'un verre ou en attendant le taxi pour donner un sens à leur vie. » [vi]


Peut-on prendre au sérieux l'histoire d'un pays effectuée d’une manière aussi caricaturale et raciste ?


Stearns écrit qu'Onana utilise des archives historiques, mais « il est rare que ces sources appuient réellement ses affirmations. » Aucun nom, aucun fait, aucune affirmation, aucun exemple n'est donné.


On a l'impression que Stearns ne veut pas gagner le débat, mais seulement tenter de faire taire par la calomnie.


Dans une longue série de feeds twitter joints à l'article, Stearns écrit que le Rwanda devrait bien sûr subir des pressions, mais oublie que dans cet article, il écrit que l'appel du docteur Mukwege à des sanctions contre le Rwanda pour mettre fin aux viols massifs est fondé sur une perception.


Stearns qualifie de « pompeux » l'accueil réservé à Onana par l'université de Kinshasa et le gouvernement de la RDC lors de son récent voyage au Congo en Mars 2024.


 



L'attribution erronée de la responsabilité du génocide rwandais


Dans la section suivante, «  Le génocide des Tutsis,  une supercherie » Stearns attaque les analyses d'Onana sur les événements du Rwanda 1990-94. Stearns écrit : « Sa version des événements au Rwanda a été contestée en France : il a été mis en examen en 2022 pour contestation publique de l’existence de crime contre l’humanité. » Cette affirmation est erronée car Onana est inculpé pour négation de génocide, et n'a jamais remis en cause le meurtre de masse des Tutsis, ainsi que des Hutus, au Rwanda.


Ce sont trois ONG qui ont déposé la plainte contre Onana : la Fédération internationale des droits de l'homme, Survie et la Ligue française des droits de l'homme. Il est regrettable que des ONG de défense des droits de l'homme et des think tanks (groupes de réflexion) perdent du temps et de l'argent pour faire taire un intellectuel ! Dans un pays autoritaire et dystopique comme le Rwanda d'aujourd'hui, où même le héros du film hollywoodien Hotel Rwanda, Paul Rusesabagina, a été arrêté et accusé de négation du génocide, on peut se demander ce que l'imitation des politiques répressives rwandaises révélera du comportement de ces ONG occidentales. Les récentes enquêtes poignantes menées par un groupe de 50 journalistes de Forbidden stories, Rwanda classified, Au cœur de l'engrenage répressif du régime de Paul Kagame, examinent l'état effroyable du journalisme et de la vie dans le Rwanda d'aujourd'hui, où l’accusation de négation du génocide est devenue un outil pour réduire au silence et réprimer toute forme de liberté d'expression ou de dissidence.


Dans une étude récente réalisée par Benn Freeman, Directeur du programme « Démocratiser la politique étrangère » à l'Institut Quincy, nous constatons le degré dangereux de conflit d'intérêts dans les travaux d'étude émanant de think tanks souvent financés par des entreprises militaires. De nombreuses ONG ont été politiquement cooptées et ont pris des positions partiales avec de graves conséquences pour les pays concernés, comme Human Rights Watch sur la Côte d'Ivoire.

 

Ce n'est pas la première fois qu'Onana fait face à des accusations. En 2002, Onana a publié Les secrets du génocide rwandais,enquêtes sur les mystères d'un président, alors que le président rwandais, Paul Kagame, était salué par la presse internationale comme un héros pour avoir arrêté le génocide, Onana l'a accusé d'avoir comploté pour abattre l'avion présidentiel le 6 avril 1994 - l'étincelle qui a allumé les feux des massacres de 100 jours. En 2002, le président Kagame et l'État rwandais ont porté plainte pour diffamation à Paris contre Onana devant la 17e chambre du tribunal de grande instance, mais ont abandonné les poursuites 48 heures seulement avant le début du procès. Onana avait accumulé 3 000 documents, ainsi que des témoins directs qui avaient été sur le terrain pendant la tragédie, y compris des membres de l'ONU comme le colonel Luc Marchal, commandant belge de la MINUAR à l'époque à Kigali, pour témoigner devant le tribunal et soutenir les conclusions du livre.


L'ancien président de l'Association des journalistes rwandais, Déogratias Mushayidi, un survivant tutsi des massacres et intellectuel qui a écrit le livre de 2002 avec Onana, a été emprisonné par Kagame en 2010 et il est toujours en prison depuis. Suite au livre de 2002, d'importantes plaintes judiciaires ont été déposées en France et en Espagne et d'innombrables autres témoignages ont tous accusé le FPR de ce crime majeur.


Il faut souligner que le livre actuellement attaqué - La vérité sur l'opération Turquoise, quand les archives parlent - est le fruit d'une thèse de doctorat obtenue par Charles Onana en 2017 à l'Université de Lyon et avalisée par un jury international qui en a reconnu la valeur scientifique.


Onana ne dit pas qu'il n'y a pas eu de génocide, mais dénonce la mauvaise attribution de la responsabilité du génocide au Rwanda. Il en va de même pour de nombreux autres chercheurs comme les experts en propagande Edward S. Herman et David Peterson dans Enduring Lies, The Rwandan genocide in the propaganda system 20 years later : « L'institutionnalisation du génocide rwandais (dans les livres d'histoire, les études sur le génocide, les documentaires, l'histoire officielle du Tribunal international pour le Rwanda et même proclamée par le Conseil de sécurité de l'ONU en 2014) a été le résultat remarquable d'un système de propagande soutenu par les pouvoirs publics et privés, avec l'aide cruciale d'un cadre connexe d'exécutants intellectuels. »  Ils ajoutent que les mauvaises pratiques journalistiques sur la version officielle actuelle des événements de la tragédie rwandaise tendent à « réciter les contre-vérités institutionnalisées comme parole d'évangile tout en accusant les critiques de cette version de négationnisme du génocide. »


Stearns, qui n'a pas fait de recherches sur la tragédie rwandaise, a tendance à s'appuyer sur des versions dépassées. Alexander Zahar, professeur de droit international à la Southwest University of Political Science and Law, a défini la littérature existante sur le Rwanda disponible en 2003 comme une recherche historique médiocre et simpliste : Dans une revue des publications de langue anglaise sur le génocide rwandais en 2003, Zahar signale des ouvrages comme We Wish To Inform You That Tomorrow We Will Be Killed with Our Families de Philip Goureveitch, Alison Des Forges (Leave None to Tell the Story) et Mahmood Mamdani (When Victims become Killers, Colonialism, Nativism, and the Genocide in Rwanda), qualifie leurs récits de « naïfs, tendancieux et dérivés, écrits dans un style critique ou didactique étranger aux efforts scientifiques ». Zahar explique que ces auteurs ont tendance à « réduire la défense nationale à une conspiration criminelle, un désaccord politique à une tension “tribale,” et une guerre impliquant des forces régulières et irrégulières à un génocide ».[vii] 


La diabolisation de tous les Hutus


Gerard Prunier, que Stearns cite souvent lorsqu'il évoque l'histoire du Rwanda, est une source extrêmement partiale. Justin Podur, dans America's Wars on Democracy in Rwanda and the Democratic Republic of Congo [viii], analyse le racisme criant des écrits de Prunier : « Les Tutsis savaient collectivement, écrit Prunier, que parmi les Hutus, beaucoup étaient totalement impénitents et espéraient une nouvelle occasion de tuer à nouveau. » Prunier combine la capacité unique des africanistes à lire dans les esprits à la prose la plus colorée lorsqu'il décrit les motivations des Hutus qui ont rejoint les milices et tué des civils tutsis : les milices « ont attiré autour d'elles une nuée de gens encore plus pauvres, un lumpenproletariat de garçons des rues, de chiffonniers, de laveurs de voitures et de chômeurs sans-abri. Pour ces gens, le génocide était ce qui pouvait leur arriver de mieux ». (c'est moi qui souligne)


J'ai rarement lu quelque chose d'aussi épouvantable et raciste. Ces écrits ignobles ont permis de faire peser une culpabilité collective sur tous les Hutus jusqu'à ce jour. Ils ont également contribué à ce que des commentateurs américains, comme Philip Gourevitch, appellent à cesser de nourrir plus de 1,2 million de réfugiés vivant dans des camps de fortune au Zaïre, en les traitant tous de « génocidaires » ; ses écrits ont également permis que les camps de réfugiés soient bombardés par le régime du FPR.


Stearns écrit à propos des réfugiés hutus au Zaïre que la plupart d'entre eux sont rentrés du Zaïre en 1996, omettant que les camps de réfugiés ont été bombardés (lui il écrit que les camps ont été démantelés). Ceci est hautement improbable et n'est corroboré par aucune source : l'ancien agent sur le terrain de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), Lino Bordin, qui était sur le terrain à l'époque, estime qu'« au moins 800 000 réfugiés hutus ont fui dans la forêt congolaise et ont été massacrés par l'AFDL, une armée composée principalement de soldats rwandais, bien habillés et armés d'armes flambant neuves. » Bordin se souvient qu'un groupe de techniciens canadiens basé à Entebbe en Ouganda, chargé de rechercher les réfugiés hutus au Zaïre par avion, ne lui a pas permis de voyager avec eux et, pendant plus d'un mois, « a utilisé toutes sortes d'excuses - telles que des nuages dans le ciel qui empêchaient de bien voir - pour justifier l'impossibilité de localiser les réfugiés ». Il précise également que l'opération Turquoise menée par la France a permis de sauver de nombreuses vies, car le FPR « aurait massacré tous les Hutus si les Français n'étaient pas intervenus ». [ix] Le rapatriement forcé des réfugiés hutus au Zaïre par des bombardements était également illégal, compte tenu des massacres connus de Kibeho et d'autres massacres au Rwanda visant les Hutus, et constituait donc également un non-respect du principe de non-refoulement, qui fait partie du droit international coutumier. Un film bouleversant d'Hubert Sauper, Kisangani Diary , un massacre de Hutus loin du Rwanda, a documenté le sort de ces réfugiés hutus dans la forêt zaïroise.


Dans un document rédigé pour le HCR le 1er novembre 1994, Prunier a nié l'existence d'un rapport de l'ONU (le rapport Gersony qui documente les massacres du FPR), protégeant ainsi le FPR du dévoilement des crimes de masse odieux qu'il a commis, et prenant la défense de Paul Kagame et du nouveau régime qui est arrivé au pouvoir par la force et les massacres de masse. On ne peut que s'interroger sur le nombre de vies qui auraient été sauvées si ces apologistes du FPR avaient réellement rapporté ce qui se passait sur le terrain.[x] 


L'historien congolais Patrick Mbeko vient de publier un livre intitulé Rwanda : Malheur aux vaincus (1994-2024) - 30 ans de crime, de manipulations et d'injustice couverts par l'Occident, sur la persécution judiciaire des Hutus dans le monde entier jusqu'à ce jour, par le régime du FPR avec la complicité de nombreux pays occidentaux.


Autres éléments de langage et imprécisions


L’« aveuglement » de Washington est un autre axe récurrent que les africanistes utilisent pour protéger les actions de l'empire ; ce thème est répété ad nauseum dans leurs écrits. Stearns utilise à nouveau cette idée et écrit que l'administration Clinton a ignoré les crimes du FPR par « empathie pour le traumatisme auquel ils avaient survécu. »


Stearns qualifie les écrits d'Onana de « pseudo-scientifiques », une affirmation ridicule si l'on considère les nombreuses imprécisions et erreurs factuelles de Stearns et l'absence totale de sources d'archives dans ses écrits. D'autres exemples se trouvent dans cet article : Stearns cite un rapport sur les discours de haine au Congo rédigé par deux professeurs rwandais qui travaillent dans un pays où la liberté d'expression est nulle et dont le pays occupe l'est du Congo depuis maintenant presque trois décennies. En décrivant la résistance congolaise à l'occupation rwandaise comme un discours de haine, Stearns veut la discréditer. C'est comme citer deux professeurs sionistes sur la résistance palestinienne, une résistance qui est souvent réduite, pour nuire à sa réputation, à de l'antisémitisme ! Brouiller les sens distincts de l'antisémitisme et de l'antisionisme n'a d'autre but que de présenter des affinités trompeuses. Dans le cas du Congo, Stearns assimile de manière astucieuse les sentiments anti-Tutsi à l'opposition à l'occupation rwandaise. Ainsi, la citation d'Onana de « traquer et à extirper ces traîtres », citée par Stearns hors contexte, fait en réalité référence aux soldats rwandais infiltrés et aux milices proxy qui attaquent la population civile Congolaise. Onana souligne toujours dans ses écrits l'importance de ne pas confondre les Tutsis avec le régime du FPR dirigé par certains Tutsi.


Stearns mentionne rarement les nombreux et odieux crimes commis par les milices proxy Rwandaise en envahissant le Congo depuis 1996 (RCD, CNDP, M23, ADF). Il fait ainsi disparaître leurs graves responsabilités criminelles et obscurcit davantage la guerre d'agression internationale. Par exemple, dans un document de 2013 sur les Banyamulenge, Stearns écrit : « Cette opposition au FPR se manifeste aujourd'hui comme une résistance au M23, qui est perçu comme une initiative menée par Kigali. »[xi] ; Il tente également de dissimuler la conscience diplomatique américaine du lien direct entre le Rwanda et ces milices par procuration : par exemple, dans son dernier livre, il écrit que l’ambassade à Kinshasa avait « de profonds soupçons, mais aucun renseignement exploitable sur le soutien rwandais au CNDP ».[xii]  Pourtant, si l’on lit le câble WikiLeaks de 2008 auquel Stearns fait référence, il s’agit en fait de Stearns lui-même qui informe l’ambassade américaine de ses enquêtes à l’ONU, et il déclare tout le contraire : soulignant les liens directs (financement, recrutement et combats) entre le Rwanda et le CNPD.[xiii]


Selon Stearns, Onana dit que l'armée nationale congolaise ne commet pas de crimes alors qu'Onana souligne plutôt le problème très réel pour le Congo aujourd'hui  d’« une armée dans l'armée », un concept développé par le politologue congolais et expert en sécurité Jean-Jacques Wondo : d'innombrables milices étrangères ont été intégrées dans l'armée nationale par le biais de divers processus de paix depuis 2003 (ces anciens membres de milices prennent souvent fonctions dans les mêmes régions où ils ont agi en tant que milices, faisant ensuite défection pour créer des nouveaux mouvements militaires) ; Stearns parle d'une menace islamiste au Congo, un autre prétexte fabriqué pour de futures interventions militaires, ce qui est trompeur car les ADF sont une milice rwandaise, comme l'a révélé l'enquête détaillée de Boniface Musavuli dans le livre Les massacres de Beni .


Onana cite des témoignages de personnalités qui ont été espionnées par des femmes en faveur du régime du FPR, ce qui est un fait bien connu (et n'a rien à voir avec la race comme Stearns l'écrit dans l'article) : il y a par exemple un reportage de 2019 Des espions parmi nous diffusé par la chaîne publique canadienne CBC où une jeune femme rwandaise demande le statut de réfugiée au Canada, car elle a été forcée d'espionner pour l'État rwandais en échange d'une bourse d'études ; Charles Onana n'a jamais écrit que les Banyamulenge ne devraient pas avoir droit à la citoyenneté congolaise, comme le prétend Stearns. Au contraire, Onana reconstruit l'histoire complexe de cette communauté de réfugiés en analysant à la fois les archives congolaises et celles produites par cette diaspora tutsie ; Stearns utilise la culpabilité par association en citant des caricatures racistes, des journaux des années 1990 ou des déclarations xénophobes faites sur une vidéo You tube qui n’ont absolument aucun lien avec Onana ;  Stearns cite un site de propagande où Onana est traité de conspirationniste en oubliant de mentionner que le même site, Conspiracy Tracker Great Lakes, traite également Stearns de conspirationniste (l'objectif de la présentation d'un tel site reste un mystère) ; les ambitions expansionnistes du Rwanda au détriment de la RDC, que Stearns nie, ont été condamnées par le Département d'État américain le 2 mai dernier puis partialement remarqué en août par le gouvernement du Congo Brazzaville, qui pourrait révoquer un contrat qui donnerait au Rwanda de grandes portions de terre, dans ce qu'une ONG a décrit comme une violation de la souveraineté congolaise ; Stearns justifie (encore ! ) le dernier crime d'agression et d'invasion du Congo Kinshasa par Kagame en disant qu'il s'agit d'une réaction au rapprochement diplomatique de l'Ouganda et du Burundi avec le président congolais Tshisekedi (allez comprendre); l'exploitation illégale documentée par des milices étrangères usurpatrices est présentée par Stearns comme de la simple « corruption » : Je cite sa phrase absurde : « L'apathie et la nature exploiteuse du système international, et non l'intention criminelle, sont probablement les principaux coupables. (c'est moi qui souligne)

 




Filip Reyntjens, spécialiste du Rwanda, qualifie le site web Conspiracy Tracker Great Lakes d'outil de propagande du FPR.

 

Stearns termine son article en réduisant à nouveau une guerre internationale à un conflit entre un « méchant Rwanda » (les guillemets sont de lui) et le Congo ! 


Les nombreuses révélations fracassantes, qui remettent en question les récits hégémoniques sur la région des Grands Lacs, exposées dans les nombreux livres d'Onana, ne sont discutées nulle part. Même le titre de cet article est trompeur, car Stearns parle d'une « guerre des récits » entre le Rwanda et le Congo, alors que la véritable guerre des narrations est celle qui oppose les africanistes pro-empire et les nouveaux historiens. Ces derniers ne se réduisent certainement pas à Charles Onana, mais représentent un nombre important et croissant de chercheur qui adoptent ses mêmes conclusions.


Le principal problème du texte de Stearns est qu'il ne tient pas compte de l'énorme quantité de nouveaux documents d'archives historiques disponibles. L'histoire de la Palestine et de la Nakba n'a été réécrite que récemment par les nouveaux historiens comme Ilan Pappé, grâce à la déclassification des nouvelles archives israéliennes. Un autre aspect qu’Onana et les nouveaux historiens de l'Histoire rwandaise et congolaise ont en commun avec Ilan Pappé est la tentation constante de supprimer leur travail : les conférences sont annulées à la dernière minute car les lieux de réunion subissent des pressions politiques avec le seule but de censurer : « Les mots, rien que les mots, (...) se heurtent à toute la puissance des lobbies pro-israéliens en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis (...) Israël qualifiera ces activités d'antisémites et équivalant au négationnisme de l’Holocauste ».[xiv] 


L'histoire ne peut toutefois être comprise que lorsque des chercheurs en débattent, et le fait de réduire au silence des récits bien documentés produit un impact négatif sur son noble objectif et, dans ces deux cas, aide et encourage les génocides à se poursuivre.


Nicoletta Fagiolo, Août 2024


Traduit de l’Anglais par Sergio Samba Ebona

 

 

 

Notes


[i] Jason Stearns, The war that does not say its name, Princeton University Press, 2021. p. 68 Stearns écrit  « qu’il y a peu de preuves, comme certains le prétendent, d'une conspiration sadique visant à tuer des Congolais et qui considère Joseph Kabila comme un larbin du président rwandais Paul Kagame dans un complot soutenu par les États-Unis et l'Europe. Cet argument est relativement répandu, surtout dans la diaspora congolaise, et a été formulé par le journaliste franco-camerounais Charles Onana ou l'ancien conseiller de Mobutu, Honoré Ngbanda ». En fait, cet argument est avancé par de nombreux historiens, journalistes et politiciens, tant congolais que non congolais.


[ii] De nombreux activistes et défenseurs des droits de l'homme se rendent compte du lien direct entre l'exploitation des minerais et la guerre, comme en témoigne cette récente campagne de boycott d'Appel. Au printemps de cette année, le gouvernement congolais, par l'intermédiaire du cabinet d'avocats Amsterdam & Partners LLP, a enquêté sur des allégations selon lesquelles des minerais extraits au Congo par plusieurs entreprises et groupes armés étaient exportés clandestinement via le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi et utilisés par Appel. Les rebelles M23, soutenus par le Rwanda, ont récemment pris le contrôle de Rubaya, une ville minière clé pour le coltan dans le Nord-Kivu, un minéral essentiel pour les téléphones portables. Compte tenu de la large utilisation des minerais stratégiques présents dans la région, les entreprises impliquées sont multiples et devraient faire l'objet d'une enquête.


[iii] De 1999 à 2022, la CIJ a examiné quatre plaintes déposées par la République démocratique du Congo (RDC) concernant des actes d'agression armée commis sur son territoire par l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi. Le 31 janvier 2001, la RDC a suspendu sa procédure contre le Rwanda et le Burundi en ne maintenant que la plainte contre l'Ouganda (Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 168). Cette plainte a été déposée dans le contexte d'une guerre régionale, pour laquelle le CSNU dirigeait, depuis 1996, l'une de ses plus importantes missions de maintien de la paix, la MONUSCO (anciennement MONUC). Ici le lien, https://guide-humanitarian-law.org/content/article/3/international-court-of-justice-icj/


[iv] Jason Stearns, Banyamulenge, Insurgency and Exclusion in the mountains of South Kivu, Rift Valley Institute, Usalama Project, 2013. p 20


[v] Un jeu de mot du titre du livre de Jason Stearns « La guerre qui ne dit pas son nom »   NDT

 

[vi]  Justin Pudor, America's Wars on Democracy in Rwanda and the Democratic Republic of Congo, Palgrave Macmillan, 2021. p. 11-12.


[vii] Alexander Zahar et Susan Roho, The United Nations International Criminal Tribunal for Rwanda in Genocide at the Millenium, Samuel Totten editor, 2005. p 221


[viii]  Justin Pudor, America's Wars on Democracy in Rwanda and the Democratic Republic of Congo, Palgrave Macmillan, 2021. p. 19


[ix]  Entretien de l'auteur avec Lino Bordin, ancien fonctionnaire de UNHCR, août 2024.


[x] « Lorsque les médias et les organisations internationales parlent des « excès du FPR », ils ont à la fois raison et tort. Ils ont tort lorsqu'ils incluent dans ces dénonciations les saisies illégales de biens, les détentions arbitraires, les vols et même les assassinats. La plupart de ces actions ne sont pas le résultat d'une politique délibérée, elles sont le résultat d'une perte progressive de contrôle et d'une anarchie rampante. Mais ils ont malheureusement aussi en partie raison. Dans cette confusion générale, certains groupes restent cohérents. Il s'agit notamment de ce que l'on pourrait appeler les « suprémacistes tutsis ». Il s'agit de personnes, généralement des officiers, qui ne partagent pas la philosophie de réconciliation nationale du major-général Paul Kagame". (c’est moi qui souligne) cité par Gérard Prunier, HCR, Writnet, 1er novembre 1994.


[xi] Jason Stearns, Banyamulenge, Insurgency and Exclusion in the mountains of South Kivu, Rift Valley Institute, Usalama Project, 2013. p 46.

 

[xii] Jason Stearns, The war that does not say it’s name, Princeton University Press, 2021. p 254

 

[xiii]Wikileaks, L'équipe de l'ONU critique le Rwanda pour ses liens avec le CNDP, DRC pour ses liens avec les FDLR, 30 octobre 2008. Extrait : « Stearns a soutenu que l'équipe avait trouvé des preuves crédibles que des membres des forces rwandaises en service actif (RDF) étaient en RDC pour aider le CNDP. (…) Le CNDP, selon Stearns, exploite une station de radio à Gisenyi et il existe plusieurs comptes bancaires à Gisenyi, dont deux au nom de l'épouse de Nkunda, que l'équipe pense que le CNDP utilise pour canaliser les fonds des Congolais exilés en Europe. Stearns a déclaré que l'équipe enverrait bientôt par écrit les détails des comptes au GOR. Dans un camp de réfugiés au Rwanda, le CNDP recrute activement des jeunes hommes. Stearns a ajouté qu'au camp, la police rwandaise était présente, ainsi que des soldats démobilisés des FDR. Dans le parc national des Virunga, l'équipe a entendu de fréquents témoignages selon lesquels « des soldats parlant le kinyarwanda, qui parlaient également l'anglais, mais pas le français », opéraient dans la région. Dans tous ces cas, a souligné Stearns, le Rwanda « fermait pour le moins les yeux ». (…) Stearns a déclaré que l'équipe de l'ONU soupçonnait fortement que Tribert Rujugiro, l'un des hommes d'affaires les plus puissants du Rwanda, finançait le CNDP. Rujugiro, qui a financé l'APR de Kagame lorsqu'elle combattait le régime Habyarimana, serait très proche du président rwandais. Stearns a déclaré que l'équipe de l'ONU avait obtenu une copie papier d'un courrier électronique dans lequel Rujugiro aurait demandé à un contact de Dubaï de débloquer 120 000 dollars pour payer les soldats du CNDP. L’équipe de l’ONU tente d’obtenir l’e-mail original de Yahoo.

 

[xiv]   Ilan Pappé, Lobbying for Zionism on both sides of the Atlantic, Oneworld Publications, London, 2024. p 9

 

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